Le hussard Bartholomeus Jerzyk (2LHR)

Bonjour à tous,
Je suis absolument désolé d'avoir pris cette plume numérique si tard depuis mon inscription en septembre dernier.
Les choses ont évolué de mon côté puisque que j'ai été sollicité pour devenir chargé de TD à l'université de Reims, au débotté (de Kavallerie ?).

Je me rattrape donc, ici, avec un p'tit aperçu d'un travail que j'ai effectué l'année dernière à propos d'un "inconnu militaire de l'armée allemande" dont j'ai retrouvé l'identité (à défaut d'avoir retrouvé le lieu de sépulture... prochaine étape ? )

Voici l'acte de décès sur les registres de l'Etat-civil de la ville de Sedan pour la journée du 31 août 1870 :

« L’an mil huit Cent soixante dix le trente un août les trois heures de rélevée. Par devant nous Edmond Gollnisch adjoint au Maire de la Ville de Sedan, remplissant les fonctions d’officier de l’Etat civil par empêchement du Maire et de l’adjoint délégué sont comparus Joseph Auguste Leopold Mauseville, commissaire de police agé de cinquante six ans et Jean Baptiste Gérard brigadier de police agé de cinquante deux ans, tous deux domiciliés à Sedan ; lesquels nous ont déclaré qu’un militaire inconnu, appartenant à la cavalerie de l’armée allemande et porteur d’une plaque contenant l’inscription suivante 2LHR – IE.74 a été trouvé décédé cette après-midi à deux heures et demi sur le territoire de Sedan ; de quoi avons dressé le présent acte que les comparants ont signé avec nous après constatations du décès et lecture faite.
Signé Mauseville, Gérard, Gollnisch »

Source : Archives départementales des Ardennes : 2E409 81

Grâce à quelques livres, j'ai réussi à retrouver l'identité de ce jeune Totenkopfhusar du 2e régiment de Prusse ainsi que de retracer son parcous mais également les conditions de son décès.

Pour plus d'informations, se référer à l'article : CHEVALLIER Xavier, "Un inconnu militaire de l'armée allemande" (31 août 1870), dans la Revue historique ardennaise n°52, Société d'histoire des Ardennes, Charleville-Mézières, janvier 2021, pp.195-208.
Ainsi que la suite (et fin provisoire) de l'article dans la Revue historique ardennaise n°53, pp.311-314.

Bonne lecture et j'attends, désormais, avec impatience vos réactions !

Bonjour à tous , bonjour Xavier ,

      Je n'ai pas de mérite à engager la discussion puisque je me suis rendu acquéreur des volumes où cette histoire a été développée avec talent par notre nouvel ami .
      Le  cadre de son enquête doit cependant être précisé :  L'investissement de la place forte de Sedan où Napoléon III et Mac Mahon ,animés par l'espoir chimérique de libérer l'armée de Bazaine encerclée à Metz , ont conduit les troupes françaises concentrées à Chalons sur Marne , n'est pas encore réalisé .
       Les Allemands cherchent à contrôler les accès de la place ,les Français à se regrouper pour organiser la défense du site .Et donc pour l'instant pas de combats sanglants  , pas encore de charges héroiques .
       La cavalerie allemande est donc missionnée pour " tâter" les défenses françaises au Sud et à l'Ouest de Sedan . Des patrouilles de Uhlans et de Hussards prussiens se mettent en route au petit matin de ce 31 Aout 1870 et s'approchent en particulier de l'entrée de la forteresse dans le secteur où est située aujourd'hui la gare de Sedan.
       Les remparts sont cependant garnis de défenseurs bien réveillés qui ouvrent rapidement un feu nourri sur les intrus qu'ils distinguent entre les bancs de brume . Sans appui ni d'infanterie ni d'artillerie, les cavaliers prussiens " piquent des deux " et vont se mettre hors de portée du tir des Français .
        C'est donc une escarmouche sans aucune incidence sur le cours des combats mais là aussi , les Chassepots ont fait merveille et c'est notre hussard Jerzyk qui en fait les frais .
         Si Jerzyk est un quasi anonyme de l'époque , son histoire prend un relief particulier du fait de son appartenance à l'un des régiments prussiens les plus prestigieux , le 2 Leib Husaren dont les emblèmes à tête de mort terrifiaient ceux qu'ils approchaient . Et ,quelle fin tragique pour ce jeune homme de culture polonaise comme son nom l'indique ,originaire de la province de Posen ( aujourd'hui Poznan , en Grande Pologne) , venu mourir sur les bords de la Meuse pour une cause qui lui était sans doute étrangère...
          Je ne déflore pas plus le sujet pour l'instant.

                        Amicalement,

                          Michel.

Kuckuck Michel !

Kuckuck à tous !

Désormais, nous savons où son corps a été enterré le soir du 31 août 1870... toutefois, l'endroit a subi des modifications (à cause de l'urbanisme) colossales dans les années 70... Des immeubles ont poussé là et aucun témoignage dans la presse locale comme quoi, lors des travaux, ils auraient retrouvé, 100 ans plus tard, des ossements.
Quid de l'équipement du hussard ? Les archives municipales de Sedan ne sont que très difficilement accessibles et, manifestement, quelques éléments de sa dotation théorique, auraient été partagés par les tireurs français.

Dans quelques jours, vous aurez droit à une anecdote (inédite ?) bavaroise et sedanaise.

Bis später, Kameraden !

Xavier

Bonjour à tous , bonjour Xavier ,

      Je connais bien les lieux ( la moitié de ma famille est originaire de Saint Menges et de Sedan) La démolition des remparts au niveau de Torcy et .l'implantation de la nouvelle gare de Sedan ont tellement bouleversé le paysage qu'il faudrait un miracle pour y retrouver la trace d'une tombe isolée.;Mais , n'oublions pas que la ville de Sedan a été occupée et administrée jusqu'en juillet 1872 par l'Armée allemande .
      Or, sitôt les dizaines de milliers de prisonniers français évacués , les troupes d'occupation ont du se lancer avec le  concours des municipalités françaises dans le nettoyage de la région et le regroupement des tués au combat sommairement enterrés ou laissés sur le terrain .IL y avait de toutes façons une urgence sanitaire à le faire pour éviter la propagation d'épidémies dans la population civile et l'on a dû s'activer dans cette tâche . Le meilleur exemple  de cet épisode est l'ossuaire de Bazeilles, qu'on visite encore aujourd'hui mais que je déconseille aux âmes sensibles .
      Dans cette situation , je n'exclus pas que le corps de B.Jerzyk  ait pu être transféré à l'époque par les Allemands ailleurs dans les environs , quand on connait leur souci d'honorer dignement la mémoire de leurs soldats .
      De plus , fait extraordinaire , le 31 aout 1870 étant une journée sans combats d'importance , le décès de l'infortuné hussard a été enregistré à l'état civil de Sedan présidé par Edmond Gollnisch ,futur maire de la ville qui ne pouvait pas avoir oublié les circonstances de l'escarmouche fatale quand il s'est agi de regrouper les sépultures dans les mois qui ont suivi...
      Alors ..... la solution est peut être dans les archives allemandes et plus encore l'inventaire des tombes militaires logées dans les cimetières les plus proches .

                                 Amicalement ,

                                     Michel.

Bronsart a écrit:Si Jerzyk est un quasi anonyme de l'époque , son histoire prend un relief particulier du fait de son appartenance à l'un des régiments prussiens les plus prestigieux , le 2 Leib Husaren dont les emblèmes à tête de mort terrifiaient ceux qu'ils approchaient . Je ne déflore pas plus le sujet pour l'instant.

Sans déflorer moi non plus le sujet, ni effeuiller la marguerite...Voici une LH2 moins terrifiante que ces homologues masculins...  


J'ai nommé le princesse Victoria Luise  


Deux uniformes différents, mais du même 2 LHR. Le premier Kolback est en opossum (officier deuxième mouture) l'autre est en loutre.

Et je ne peux résister à vous exhiber le superbe General-Feldmarschal Ludwig August Von Mackensen, au regard tellement aquilin :

Bonjour à tous ,bonjour Clovis ,

             Ces 2 personnages sont effectivement photogéniques dans leur tenue de LeibHusar mais ne la portent pas au même titre :

   Viktoria Luise ,seule fille de Guillaume II et son dernier enfant était "  à la suite " du Rgt n°2 dont traditionnellement la reine de Prusse était " Cheffin ", c'est à dire colonel honoraire . Comme elle était très gracieuse , elle fut abondamment photographiée dans cet uniforme et son pére la distingua particuliérement en la nommant à son tour colonel honoraire du Rgt en 1909 . Elle ne porta plus que rarement cet uniforme après son mariage retentissant en 1913 avec Ernst  August de Hanovre qui la fit devenir duchesse de Brunswick  .
 
    Le frère ainé de Viktoria Luise , le Kronprinz Frédéric Guillaume que l'empereur avait fait "Chef " du 1er Rgt de Leibhusaren est vu très souvent avec cet uniforme dans lequel il n'est pas mal non plus...

    Quant au Maréchal von Mackensen  , bourreau des armées russes en  14-18 , s'il avait commencé sa carrière militaire au N°2 avant 1870 , c'est au N°1 qu'il devint colonel Chef de corps puis Général commandant à Danzig la brigade regroupant les 2 rgts .
    Sur les 2 photos présentées par Clovis c'est l'uniforme du n°1 qu'il porte. En Feldgrau ,la plus tardive des 2 puisqu'il porte la Grand Croix de la Croix de Fer obtenue en 1915 , son attila est ornée des 2 épaulettes à batons croisés de Feld Marschall.

                      Ces tenues sont d'une rare élégance ...

                                 Amicalement ,

                                     Michel .

Merci Michel

Voici, pour Guillaume II et son fils, le Kronprinz :

Bonjour à tous ,

        Comme souvent , nous nous sommes éloignés du sujet d'origine pour nous délecter des uniformes de la famille impériale et des maréchaux .il est vrai qu'il y a de quoi devenir fétichiste !

        Je vous propose donc de revenir à Sedan le 31 Aout 1870 et de porter notre regard sur les objets qui accompagnaient le Hussard Jerzyk dans ses derniers instants .
         D'après l'enquête minutieuse menée par notre ami Xavier et exposée dans son ouvrage ,les militaires français qui ont retrouvé le corps du hussard , ont commencé par récupérer sur le terrain ses armes , pour se les partager ensuite .
          Sont repris dans ces témoignages, un court mousqueton de cavalerie (M1857 , porté en 1870 par tous les dragons et hussards prussiens).
Je ne peux pas vous montrer le modèle car je n'en possède pas .
          Pas de lance , portée uniquement par les uhlans en 1870 .

          Je vous propose donc une photo personnelle avec ce que j'ai sous la main:  


                                 


          Cette photo est évocatrice des hussards prussiens en 1870 .
          Vous y voyez au premier plan la sabretache de troupe M  1850 en cuir noir avec ses 3 suspentes permettant l'accrochage à un ceinturon de dessous porté sous l'Attila .Elle est ornée en son milieu du monogramme FWR ,en métal jaune ou blanc selon la couleur des boutons de L'Attila .Cette sabretache étant marquée 1854 9H et le 9ème Hussard portant des boutons jaunes , le monogramme  est ici en laiton ; Le 2 LHR ayant des boutons blancs , le monogramme de la sabretache de Jerzyk était en maillechort, identique à celui posé à droite .
                          Sous la sabretache est posé un sabre de troupe de cavalerie légère , réceptionné en 1864 et réglementaire en 1870 pour les dragons , hussards et uhlans prussiens .
                          La cerise sur le gateau est qu'il est matriculé , arme et fourreau 2 H.3. 18 c'est à dire dans l'unité de Jerzyk et que l'homme et le sabre se sont certainement croisés à L'époque!

                           Le monde n'est pas si mal fait pour nous permettre de faire encore de tels rapprochements ...

                                              Amicalement ,

                                                  Michel.